Orateur
Description
Partout, nous entendons que le "numérique" est un responsable (no résiduel) du réchauffement climatique, notamment avec la frénésie autour de l'Intelligence Artificielle et ses applications. Cependant, il convient de séparer empreintes environnementales liées à sa fabrication ou à son exploitation. Ainsi, dans des pays comme la France où la production d'électricité est largement décarbonée, l'exploitation d'un serveur face à sa production n'en représente finalement, chaque année, qu'une fraction. Utiliser le matériel le plus longtemps possible semble, de prime abord, une approche vertueuse mais qu'en est-il vraiment ?
Au Centre Blaise Pascal, accessoirement centre d'essai du mésocentre (le PSMN) et data center de l'ENS de Lyon, nous récupérons le (vieux) matériel depuis plus la création de l'unité en 2009. A l'origine, cette approche était là pour pallier un défaut d'infrastructure : les idées devaient se substituer aux moyens financiers. Désormais, il convient de juger s'il reste pertinent de d'offrir une seconde vie aux matériels, et sous quelle nature.
Aux regards des statistiques de 2024 sur le matériel de l'unité (90% de matériel hors garantie, 70% de matériel acheté d'occasion pour 99.8% de disponibilité), nous apporterons quelques éclairages très factuels sur ce qu'il est possible de réaliser avec du matériel, hors garantie, jugé archaïque et de facto obsolète : de la remise en service "en l'état" de machines pour les transformer en cluster de formation ou d'expérimentation au détournement moyennant une adaptation mineure de vieilles stations de travail pour les transformer en outils de machine learning ; du "refactoring" de vieilles baies de disques durs en des équipements de sauvegardes ou de stockage local de machine récente au détournement complet d'usage de composants pour des utilisations tierces.
De plus, si nous entrons dans les entrailles de ces machines, nous réalisons que la brique de base, la porte logique, produit un "déchet" dans son exploitation, la chaleur dite « fatale ». Comment est-il possible de valoriser cette "chaleur fatale" ? Nous détaillons les initiatives originales mises en oeuvre depuis plusieurs années sur l'ensemble du campus : de l'immersion de machines directement dans l'huile à la distribution des "AnchIAles" (des machines gavées de monstrueux GPU pour du Machine Learning) dans les bureaux en hiver pour les chauffer...
Au delà des objectifs, nous détaillerons les moyens techniques mis en oeuvre pour permettre ces requalifications ou ces détournements, mais aussi l'attention donnée à la métrologie sanitaire des composants critiques. Part belle sera donnée à l'exploitation de techniques systématiques sans la moindre installation de logiciels ou à l'examen de composants les plus "fragiles" : disques durs et mémoire vive.
Nous conclurons que dans un contexte de pénurie (relative) de matériel neuf, d'une scalabilité exigée des infrastructures pendant la pandémie, de l'émergence de nouvelles technologies de refroidissement, le "Digital Staging" est toujours possible, du moment que quelques moyens humains y sont consacrés. Une certaine souveraineté est à ce prix !
